Jets de projectiles contre un véhicule de police et heurts entre groupes de jeunes et CRS, le 30 juin 2023 à Marseille

Jets de projectiles contre un véhicule de police et heurts entre groupes de jeunes et CRS, le 30 juin 2023 à Marseille

afp.com/CHRISTOPHE SIMON

Alors que notre société nous apparaissait comme immuable, les violences que nous avons connues nous ont rappelé avec une particulière insolence, la fragilité de cette dernière. Bafouée. Brûlée. Pillée. Le réveil fut terrible pour la France tout entière qui se leva chaque matin, le visage un peu plus ensanglanté que la veille. C’est ainsi que tout repère moral, civilisationnel ou culturel disparaissait chaque soir un peu plus, sous la fumée de cocktails Molotov jetés pour brûler nos mairies, de mortiers utilisés pour tuer nos forces de l’ordre. Il y aura à n’en pas douter, un avant et un après 27 juin 2023. Il y aura une France d’avant ces violences et une qui lui succédera nécessairement ; le cœur et l’esprit des Français ont ainsi été touchés par l’incroyable et violente remise en cause de cet ensemble que l’on nomme République.

Publicité
LIRE AUSSI : Emeutes : quand la rénovation des quartiers est aussi un enjeu sécuritaire

Si l’intensité de ces violences a dépassé l’entendement, c’est la jeunesse de leur auteur qui nous a assurément glacé le sang. Comment imaginer ce jeune, à l’image de celui interpellé à l’âge de 10 ans dans la Loire, s’insérer dans notre société et en partager les codes ? Comment concevoir qu’un adolescent puisse à ce point nous détester, lui qui a tant reçu de nous, de sa naissance, à l’incroyable douceur de vivre de notre pays, jusqu’à l’école gratuite dont il a pu bénéficier, et hier incendiée ? Derrière ces questions se cache la poursuite d’un idéal mortifère que nous suivons depuis trop longtemps : celui de croire qu’un enfant peut pleinement devenir citoyen français, aimer les siens et son pays, sans jamais avoir connu l’existence d’un cadre au cours de sa vie.

Gare aux solutions imparfaites et incomplètes

Si une partie de la classe politique est assurément à l’origine de cette défaite idéologique, les responsables sont aussi les parents qui ont honteusement choisi l’abandon de leur fonction première ; celle de donner à leurs enfants un cadre nécessaire et salutaire. De cette démission a surgi le chaos, plongeant notre pays dans une décadence manifeste. "L’ordre, et l’ordre seul, fait en définitive la liberté", rappelait Charles Péguy. L’actualité vient assurément lui donner raison. Si cette quête de liberté est nécessaire, elle doit donc être conditionnée au respect de l’ordre et donc d’un cadre. On ne peut donc pas à la fois faire de la liberté notre devise nationale, sans avoir à l’esprit que l’ordre est une condition nécessaire à sa jouissance.

LIRE AUSSI : Emeutes : LR ou le pari de la "radicalité gestionnaire"

À ces parents, l’État doit rappeler leur responsabilité et en l’espèce, leur carence. De la suspension des aides sociales au prononcé de lourdes amendes, en passant par la menace de la prison, l’Etat doit tout mettre en œuvre pour rappeler à ces parents que leurs enfants ne peuvent être le fardeau de la société tout entière. Pour autant un principe de réalité viendra rapidement nous rattraper : que faire de l’enfant ? Il est en effet cette réalité sociale qui s’impose à nous et qui, par nature, continuera de l’être pour de nombreuses décennies. L’enjeu de sauver notre pays de ce chaos annoncé est trop grand pour se limiter à des solutions imparfaites, car parfaitement incomplètes.

Seconde chance

C’est pourquoi face à ces phénomènes nouveaux, il nous faut penser des sanctions nouvelles, qui toucheront à la fois parents et enfants. Il convient ici de se remémorer la logique des internats d’excellence mis en place sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. La logique était simple : accueillir des élèves méritants, désireux de réussir et de s’extraire d’un milieu difficile.

Le problème est qu’il existe aujourd’hui un dispositif permettant à ces jeunes bien intentionnés de sortir des quartiers les tirant vers le bas, mais il n’existe rien en revanche pour les extraire de façon contrainte de ce même milieu. Pourtant, il semble évident que trop de jeunes sont sous influence de "grands frères" et dont la trajectoire vers la prison est déjà toute tracée. C’est donc ici qu’interviendrait l’innovation en matière judiciaire avec la création d’internat de la République dont l’encadrement serait la clef de voûte.

LIRE AUSSI : Après les émeutes, Macron face au défi de l’union nationale

Le placement dans ces internats de la République serait une condamnation dès lors que l’acte commis par l’enfant est d’une particulière gravité, et que manifestement, ses parents semblent totalement absents. Cette logique apporterait ainsi de nombreux avantages : celle d’écarter l’excuse de minorité ; de redonner un nécessaire cadre à ces enfants ; de leur offrir une seconde chance.

Modèles autres que les "grands frères"

Par ces internats de la République, ces jeunes apprendront que la société peut, et doit leur dire non. Ces internats leur permettront également de bénéficier de modèles autres que les "grands frères", par la proximité quotidienne avec des autorités. Ils pourront par la même occasion se réconcilier avec l’histoire et la grandeur de leur pays. Ces internats, enfin, devront nécessairement et symboliquement être en partie financés par leurs parents démissionnaires et dont la démission fait peser une charge financière dont ils ne sauraient se détacher.

LIRE AUSSI : "Justice pour Nahel" : l’influence grandissante du comité Adama Traoré

Alors que notre pays traverse plus que jamais une période d’incertitude, ces internats de la République peuvent constituer cette main tendue, la dernière, et ainsi une tentative pour refaire société. Car penser que les recettes déjà mises en œuvre par le passé, à l’image des milliards déversés par les plans banlieue, produiront des effets différents cette fois-ci est pure utopie.

Publicité