Emeutes de 2005 : retour sur les trois semaines qui ont enflammé la France
Il y a dix ans, la mort de deux adolescents originaires de Clichy-sous-bois déclenchait des émeutes dans des dizaines de banlieues en France. Le JDD.fr revient sur le déroulement de ces violences qui ont embrasé les quartiers de France.
27 octobre : la mort de Zyed et Bouna met le feu aux poudres
Une banderole à l'effigie de Zyed et Bouna (Sipa)
Le 27 octobre 2005, trois jeunes pénètrent sur un site EDF alors qu’ils sont poursuivis par la police à Clichy-sous-bois, en Seine-Saint-Denis, alors qu'il était . Ils se réfugient dans un transformateur électrique. Zyed Benna (17 ans) et Bouna Traoré (15 ans) trouvent la mort , électrocutés. Muhittin Altun (17 ans), grièvement blessé, survit. Selon l'Inspection Générale des Services (IGS), un des officiers de police aurait déclaré : "S'ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau". Aucun d’entre eux ne prendra l'initiative de secourir les trois jeunes.
A Clichy-sous-bois, les habitants s'insurgent et accusent la police d'être responsable de la mort de Zyed et Bouna. Les violences débutent vers 21h30 dans le quartier du Chêne-Pointu. Des voitures sont brûlées et des jeunes affrontent les forces de l'ordre. Un fourgon de CRS est la cible de tirs à balles réelles. Durant cette première nuit d’émeutes, 23 policiers sont blessés et 14 personnes interpellées. Les violences se poursuivent pendant les deux nuits suivantes, à Clichy-sous-bois et à Montfermeil.
30 octobre : un apaisement de courte durée
La marche silencieuse en hommage à Zyed et Bouna (Sipa)
Le 30 octobre, trois jours après la mort de Zyed et Bouna, les rues retrouvent leur calme. Une manifestation silencieuse en hommage aux deux adolescents rassemble près de 500 personnes à Clichy-sous-bois. Le maire de la ville, Claude Dilain (PS), lance alors un appel au calme : "Depuis quelques jours, les regards se sont braqués sur notre ville. Montrons que malgré notre douleur et notre colère, nous savons rester dignes". La trêve sera de courte durée, puisque les émeutes reprennent après l'explosion d'une grenade lacrymogène à proximité de la mosquée de Clichy le même jour. Ce relent de violence met le feu aux poudres, et atteint Bondy, Neuilly-sur-Marne et Aulnay-sous-bois notamment.
2 novembre : mesures d'urgence et couvre-feu
Les émeutes se poursuivent durant deux semaines et s'étendent en dehors de l'Ile-de-France (Sipa)
Le 2 novembre, le Premier ministre Dominique de Villepin présente, devant l'Assemblée nationale, le projet du gouvernement pour répondre à la crise des banlieues : "Un projet de loi sera élaboré sous ma coordination dans les prochaines semaines. Cela passe aussi par des logements plus décents. Le programme de rénovation urbaine de Jean-Louis Borloo va changer durablement les conditions de vie dans les quartiers. Cela passe surtout par un emploi pour tous". Le lendemain, une réunion de crise se tient à Matignon.
Dominique de Villepin précise les intentions du gouvernement pour résoudre la crise : "Nous allons aider davantage les enseignants, les policiers, les agents des services publics dans les quartiers, nous allons renforcer l'accompagnement pour les jeunes qui cherchent une formation ou un emploi", détaille-t-il.
Ces déclarations n’apaisent pas la situation dans les banlieues, et le 4 novembre, les émeutiers s'en prennent aux transports en commun. A Sevran, un bus est incendié, et une femme handicapée qui se trouve dans le bus est gravement brûlée. De son côté, le Premier ministre reçoit 16 jeunes issus des quartiers sensibles en vue d’apaiser les tensions. Des émeutes éclatent aussi dans les banlieues de province. Les villes de Pau, Rennes et Evreux sont notamment touchées par les violences.
Après le couvre-feu, l'état d'urgence, première depuis la guerre d'Algérie
Le 8 novembre, Dominique de Villepin avance le conseil des ministres et active l'état d'urgence. Cette mesure permet aux préfets de décréter des couvre-feu dans les zones sensibles. Elle n'avait pas été prise depuis la guerre d'Algérie. Le président Jacques Chirac précise que c'est une démarche "nécessaire pour accélérer le retour au calme".Dominique de Villepin définit le cadre d'application de la mesure d'urgence : "Sur la base d'arrêtés préfectoraux, certaines communes et certaines parties de communes pourront se voir appliquer des mesures d'interdiction ou de restriction de la circulation des personnes ou des véhicules". Les préfets pourront assigner à résidence ou interdire de séjour les "fauteurs de troubles". Ils pourront le cas échéant exiger que leurs armes leur soient remises. Le Premier ministre annonce également la création "d'une grande agence de la cohésion sociale et de l'égalité des chances", qui sera "l'interlocuteur des maires pour toutes les questions relatives aux quartiers sensibles". "20.000 contrats d'accompagnement pour l'emploi et contrats d'avenir seront réservés" aux quartiers difficiles. Il annonce en plus la création, "dès janvier 2006, de 5.000 postes d'assistants pédagogiques pour les 1.200 collèges des quartiers sensibles" et le déblocage de 100 millions d'euros supplémentaires pour les associations en 2006.
Le Président de la République Jacques Chirac prend la parole à la télévision le 14 novembre pour "dire aux enfants des quartiers difficiles, quelles que soient leurs origines, qu'ils sont tous les filles et les fils de la République".
17 novembre : retour au calme
Amor Benna, le père de Zyed, au procès des policiers pour non-assistance à personne en danger, en mai 2015. (Sipa)
Le 17 novembre, le calme revient dans les banlieues. Pour la première fois depuis trois semaines, la police fait état d'une "situation normale partout en France". Le 18 mai 2015, un peu moins de dix ans après les faits, le tribunal correctionnel de Rennes prononce la relaxe définitive des deux policiers inculpés pour "non-assistance à personne en danger" , estimant qu'ils n'avaient pas connaissance d'un danger "certain et imminent" pour les jeunes.
Source: leJDD.fr
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